Christophe Rocancourt : un mythe sans envergure
Je ne vais pas vous raconter en détails le parcours extraordinaire de ce Français parti de rien qui a réussi à arnaquer les plus grandes stars de Hollywood. Je vais juste vous rappeler rapidement que cet homme né à Honfleur et issu de l’assistance publique s’est installé en 1999 en Californie dans le but d’user de son charme pour se faire prêter de fortes sommes par la haute bourgeoisie américaine, notamment en se faisant passer pour l’héritier Rockefeller (un Rockefeller avec un accent français prononcé, étonnant non ?). En ce moment il fait la promotion de son livre « Mes vies » à la télévision et je suis assez choquée du chaleureux accueil qu’il reçoit. Les présentateurs élèvent ce voleur au rang de star, de mythe, ils s’amusent de ses coups foireux et surtout n’hésitent pas à lui cirer les pompes. Certes, réaliser son rêve américain en naissant dans la misère normande ressemble à un conte pour enfants crédules mais l’analyse et la prise en compte du parcours du jeune homme s’avèrent essentielles. Effectivement, ce petit malfrat a commencé par truquer son identité, il a vendu des biens qui ne lui appartenaient pas et a bâti toute sa gloire et sa fortune sur l’escroquerie et le culot. La justice américaine l’a d’ailleurs condamné à cinq ans de prison et 1.2 million de dollars d’amende. Aujourd’hui, il revient fier comme un paon, droit dans ses baskets, il estime avoir payé sa dette à la société et certains animateurs en quête d’audience l’invite, le flatte, lui tirent la révérence et finalement deviennent les complices de la promotion du vol et du mensonge. Avec son manque d’humilité Christophe Rocancourt donne l’image d’un être arrogant, orgueilleux, dédaigneux ; visiblement il se sent supérieur au commun des mortels et ne regrette absolument pas ses agissements. Il prétend même avec une grande fierté qu’il paye 33% d’impôts et que les droits de son livre ont été vendus à un million d’euros. Il ajoute qu’il a placé en sécurité un gros pactole issu de ses précédentes arnaques, quelques victimes n’ayant osées réclamer leur dû afin de conserver leur honneur à défaut de leur patrimoine. Tout cela m’écoeure, quel est le message que transmettent les médias ? Violer les lois, comploter contre ses concitoyens, peu importe les moyens l’essentiel demeure l’ivresse, le pouvoir et la réussite à n’importe quel prix.
Christophe Rocancourt essaye de se faire passer pour un robin des bois des temps modernes : il ne vole qu’aux riches cupides et malhonnêtes ! Quel brave homme ! Seulement, il oublie de redistribuer le fruit de ses méfaits et préfère flamber au soleil de Malibu, jouir de la jet-set et vivre dans le luxe. Il désire même se faire passer pour un intellectuel éclairé en citant Nietzsche et en délivrant quelques leçons de moralité du style : « Il faut s’arrêter dans la rue quand un pauvre vous tend la main pour discuter avec lui ». Je définis Christophe Rocancourt comme un parasite (au sens propre du terme) de la société : il travaille pour lui-même mais ne crée rien, survivant simplement grâce au labeur et à la naïveté de ceux qui ont voulu lui tendre la main. Par ailleurs, j’ai beaucoup de difficultés à comprendre comment un homme avec aussi peu de charisme, de charme, d’aisance verbale et de vocabulaire a pu entourlouper des tas d’investisseurs riches comme Crésus … Au bout de seulement cinq minutes d’interview je me rend facilement compte que le monsieur n’a pas inventé l’eau chaude, il a même franchement du mal à prononcer une phrase complète avec sujet, verbe et complément, son éloquence se restreignant à deux mots : « oui » et « non ». Qui est le nègre qui a pondu son bouquin ?
Enfin, ce qui m’exaspère le plus aujourd’hui, c’est que malgré ses méfaits, cet escroc peut sortir de prison avec un matelas doré (qui n’a pas été saisi) et se permettre de pavaner en faisant passer le message : « je suis le plus beau, je suis le plus fort, peu importe les règles et les lois du moment que je vis de luxe et de paillettes ». Ainsi, au lieu de faire les louanges des millions de gens honnêtes qui le méritent, les médias préfèrent encenser un homme parce qu’il fraude et qu’il le revendique, ils font donc le choix de véhiculer comme principale valeur morale le pognon, peu importe la source de celui-ci. La notion de mérite reste complètement oubliée et de nos jours la société dans sa globalité se contente de faire l’éloge de l’argent roi. Je me demande alors comment le fameux « petit jeune de banlieue » (bientôt aussi célèbre que la ménagère de moins de cinquante ans) à problèmes va analyser la mise en lumière d’un anti-héros immoral pour qui la fin justifie les moyens. Ne va-t-il pas le considérer comme un exemple à suivre ?