Mon espace vital
N’avez-vous pas l’impression d’être agressé(e) en permanence par les gens qui vous entourent ? Comme n’importe quel animal, j’ai besoin de mon espace vital, une zone imaginaire qui m’appartient et dans laquelle personne ne pénètre sans mon autorisation. Afin de délimiter cette aire, j’ai bien sûr pensé à uriner sur le sol mais au bureau ça fait mauvais genre … Donc je dois démasquer le plus tôt possible les milliers d’emmerdeurs potentiels qui m’entourent afin de ne plus me laissez marcher sur les pieds, et ce n’est pas facile car je dénombre plusieurs catégories de casse-couilles. D’abord, existe le gars qui ne peut pas s’empêcher de me parler à moins d’un centimètre du visage, j’ai l’impression qu’il détaille chacun des grains de ma peau et son regard inquisiteur me met mal à l’aise. C’est souvent lui qui possède un fort problème de digestion et qui passe son temps à souffler son fumet dans mes sensibles narines. Je ne tiens pas plus de 30 secondes en apnée donc j’adopte la stratégie de repli : je recule d’un mètre. Pour ne pas me sentir oppressée j’ai besoin d’être effectivement à une distance convenable de mon interlocuteur, je ne tolère pas la sensation d’un étranger contre moi, de ressentir la chaleur de son corps ou l’odeur de ses aisselles … ce genre de pratiques n’est réservé qu’à Roberto.
Ensuite, dans une catégorie proche, je fuis les gens tactiles, qui ne peuvent pas se retenir de poser en permanence sur moi leurs sales pattes encore grasses du repas du midi. Certains s’aventurent peu vers le lavabo après la vidange alors subir le dépôt de leurs doigts boudinées sur mon bras, mon dos, ma main relève du supplice, je conserve toujours mon désinfectant dans mon sac à main … En plus, généralement ces types adorent me coller tous les matins quatre bises bien piquantes sur mes joues endolories : faîtes moi un petit signe de la main ou alors deux légers baisers parce que distribuer des dizaines de bisous par jour est vecteur de maladies virales ! D’ailleurs, certains faux maladroits essayent parfois de « déraper » à hauteur des lèvres, j’ai le ressentiment qu’ils souhaitent me passer dessus et j’admet d’autant moins leur contact. Plus jeune j’étais très tactile, aujourd’hui, je vous déconseille fortement de m’effleurer la peau sans mon autorisation, je mords !
Puis, dans le genre mal de crâne, on observe les personnes qui adorent raconter les moindres détails futiles de leur vie (je sais, je sais, c’est ce que je fais en ce moment sauf que vous n’êtes pas dans l’obligation de me lire !), j’ai le droit au récit de leur déménagement, à la description de tous les rots du petit dernier (il n’y a rien de plus insupportables que des parents qui viennent d’avoir un nouveau né, ils sont gâteux …. Beurk !), voire à la dernière panne sexuelle du conjoint ! Il n’y a pas écrit conseillère matrimoniale sur mon front …
Enfin, dernière catégorie, je note les insistants, ceux pour qui un non veut dire oui. Ils n’hésitent pas à vous demander à de nombreuses reprises votre numéro de téléphone, ils vous invitent au restaurant … toutes les semaines, et trouvent toujours un super plan deltaplane pour le week-end. Au bout de douze non consécutifs, ne croyez-vous pas qu’ils devraient se poser quelques questions ? En plus ils se vexent, supplient, et cherchent absolument à me faire culpabiliser en arborant une tête d’enterrement. Ca ne me touche pas, je suis et je resterai insensible et sans pitié envers les gémisseurs qui essayent d’attirer mon attention à tout prix. Plus vous vous complaisez en chien battu, moins je vous respecte. J’ai besoin d’un homme que j’admire, pas d’un cabotin.
En effet, aujourd’hui, je n’hésite plus à refuser, à crier « NON » haut et fort ! Pour faire face aux emmerdeurs, je ne me sens pas coupable de leur résister et je les amène ainsi à me respecter. Je reste courtoise mais ferme et surtout je ne reviens jamais sur ma décision. Il ne faut pas se laisser apitoyer par ces pauvres âmes, elles vont rapidement trouver une autre victime à ennuyer. En fait, la plupart des gens ont tellement besoin d’affection, d’amour, de se sentir valorisé, qu’ils n’osent contredire leur interlocuteur en faisant profil bas. Ainsi, ils peuvent être prêts à accepter de se faire squatter leur appartement par un opportuniste indélicat alors qu’ils meurent d’envie de le jeter à la porte. Soit vous adoptez le « hurlement primaire » (comme dirait Bigard), soit vous vous expliquez franchement. Peu importe d’être ensuite rejetée et éconduite par une personne que l’on n’apprécie pas, détendez-vous, savourez le calme après le départ de ce squatteur mal élevé. Peut-être que moi aussi j’ennuie profondément les autres et que je leur casse les pieds, je peux être irritante quand je refuse systématiquement des invitations à boire un verre, je suis parfois grognon, lunatique, et même misanthrope, j’en ai conscience et surtout mes interlocuteurs peuvent me le faire remarquer et me dire « non » eux aussi … dommage que je sois si rancunière ! J